1976 : Berberian Sound Studio est l'un des studios de postproduction les moins chers et les plus miteux d'Italie. Seuls les films d'horreur les plus sordides y font appel pour le montage et le mixage de leur bande sonore. Gilderoy, un ingénieur du son naïf et introverti tout droit débarqué d'Angleterre, est chargé d'orchestrer le mixage du dernier film de Santini, le maestro de l'horreur. Laissant derrière lui l'atmosphère bon enfant du documentaire britannique, Gilderoy se retrouve plongé dans l'univers inconnu des films d'exploitation, pris dans un milieu hostile, entre actrices grinçantes, techniciens capricieux et bureaucrates récalcitrants. À mesure que les actrices se succèdent pour enregistrer une litanie de hurlements stridents, et que d'innocents légumes périssent sous les coups répétés de couteaux et de machettes destinés aux bruitages, Gilderoy doit affronter ses propres démons afin de ne pas sombrer…
Séance de rattrapage pour ce film sorti en avril dernier, raté en salle mais qu'on me presse de voir depuis. Voila sans doute l'un des films les plus étranges et les plus décalés de l'année (avec Post Tenebras et Borgman). C'est d'abord un film d'ambiance. La quasi totalité de l'intrigue se déroulant dans un studio d’enregistrement, elle est donc essentiellement basée sur le son. Techniquement le travail est remarquable et il contribue presque entièrement à l'angoisse et à l'étrangeté que dégage le film. A coté de cela, le scénario est particulièrement tordu. Il faut se laisser porter sans chercher à comprendre. A partir d'un moment, cela devient tellement abstrait qu'il faut juste se laisser aller. Tel un univers à la David Lynch, on ne comprend plus rien mais on est fasciné tout de même. La direction artistique est formidable. L’ambiance année 70 est parfaitement bien rendue (décors, costumes, grain de l'image...). On se croit vraiment en 1976. La direction d'acteur suit le mouvement. Tout le monde est convaincant et particulièrement Toby Jones dans le rôle titre. Un grand rôle marquant pour ce petit bonhomme. La mise en scène accommode tout cela de façon magistrale, voir virtuose, pour nous concocter un film aussi étrange qu'anxiogène, aussi effrayant que troublant. Une espèce de film d'horreur sans meurtre et sans sang. Une œuvre marquante dont on ressort déboussolé tout autant que ravi. Je ne connais pas le cinéma italien de genre (Argento et compagnie) mais tout cela m'a l'air d'en être un vibrant hommage. Une vraie expérience visuelle et sensorielle. Un de ces films qui se méritent. Méconnu mais cultissime.