Dans les villes romantiques et désolées que sont Détroit et Tanger, Adam, un musicien underground, profondément déprimé par la tournure qu’ont prise les activités humaines, retrouve Eve, sa femme, endurante et énigmatique. Leur histoire d’amour dure depuis plusieurs siècles, mais leur idylle débauchée est bientôt perturbée par l’arrivée de la petite sœur d’Eve, aussi extravagante qu’incontrôlable. Ces deux êtres en marge, sages mais fragiles, peuvent-ils continuer à survivre dans un monde moderne qui s’effondre autour d’eux ?
Jusqu'ici, je n'avais vu (et beaucoup aimé) que deux films de Jim Jarmusch : Ghost Dog et Broken Flowers. Après son passage à Cannes (en compétition) en 2013, Only lovers left alive débarque enfin sur nos écrans. C'est donc une chance que de l'avoir déjà vu en avant-première, présenté par le réalisateur lui-même et son chef opérateur (le français Yorick Le Seaux déjà auteur de la superbe photo de Amore et de celle de plusieurs Ozon). Vu depuis quelques mois déjà, le film continue à faire son petit effet. Déjà un des grands moments de 2014. Plus le temps passe et moins je lui trouve de défaut. La mise en scène est superbe, parfaitement maitrisée, d'une belle élégance et d'une grande classe. Elle met en scène un scénario fort, sombre, bien ancré dans un monde qui s'effondre autour de personnages aux abois, qui le voit tomber en morceaux depuis des siècles. Le côté fantastique ne fait qu'accentuer cette prise directe dans la réalité et la crise. Ce n'est pas un hasard si l'intrigue se déroule en partie à Détroit, ville symbole de cette crise et de la déchéance de ce monde. La direction d'acteur de Jarmusch est toute aussi réussie. Qui d'autre que Tilda Swinton pouvait incarner cette immortelle avant tout femme amoureuse, prête à tout pour sauver son vampire de mari, Tom Hiddleston (The deep blue sea, Thor), dépressif et suicidaire ? Elle est, une fois de plus, juste et parfaite. Mia Wasikowska, toujours formidable après Stocker, en sœur à problème délurée et Anton Yelchin (Le complexe du Castor, Star Trek) en homme à tout faire, ébloui et manipulé, complètent ce quatuor très attrayant. Les images, comme la musique, sont superbes. L'ambiance est aussi fascinante qu'envoutante, le rythme est lent mais pas ennuyeux, pour une histoire d'amour aussi nostalgique que mélancolique. Jim Jarmusch nous offre donc une nouvelle vision du mythe du vampire, aussi réjouissante que romantique et désespérée. Un film magnifique qui ne laisse pas indifférent et auquel on repense bien longtemps après l'avoir vu...
Voilà c'est ça : "son petit effet". Réussi, élégant, mais pas inoubliable malgré la grande Tilda que nous vénérons tous (enfin presque tous !).