22 Novembre 2012
En 2007, 4 mois 3 semaines 2 jours faisait l'évènement en raflant la Palme d'or, nous faisait découvrir un grand cinéaste et devenait l'un de mes films préférés. C'est peu dire que le nouveau film de Cristian Mungiu était donc attendu. De nouveau à Cannes cette année, il repart cette fois avec le prix du scénario et un double prix d'interprétation pour ces actrices principales. Si ces récompenses sont amplement méritées, on peut légitimement regretter que la palme ne lui soit pas revenue à nouveau (Amour ayant été sacré pour de mauvaises raisons). La question était de savoir aussi si le réalisateur roumain allait pouvoir nous offrir quelque chose d'aussi puissant et fort que son précédent opus. La réponse, à mon grand soulagement, est oui. La durée (2h30) peut effrayer. Mais on ne sent pas le temps passer. Après la mise en place des personnages, on est vite pris dans le récit. La mise en scène de Mungiu n'a rien perdu de sa force, bien au contraire. La virtuosité est toujours là. La simplicité et le minimalisme aussi. Tout est toujours aussi sec et aride mais il y a (ce qu'il manque cruellement à Amour par exemple) une puissance et une émotion, qui, sans en avoir l'air, nous bouleverse profondément. Une fois encore, l'absence de musique accentue le trait, laissant la place à quelque chose de brut, non imposé par des violons. La force des images se suffit à elle-même et n'a besoin d'aucun artifice pour nous toucher et nous submerger. Le scénario (justement récompensé à Cannes, mais comme l'aurait pu l'être la mise en scène...) est donc, en résumé, une pure merveille. Il est inspiré d'un fait divers étonnant s'étant déroulé en Roumanie en 2005. Pour moi qui ai un problème avec les religions, quelles qu'elles soient, cela passe très bien ici. Le film n'est ni à charge ni à décharge. Il ne juge pas. Il nous laisse nous faire notre propre opinion. A la sortie, de multiples questions nous assaillent sur la foi, le mysticisme, l'aveuglement religieux. Et pourtant les religieux décrits ici seraient plus modérés que proche du fanatisme et de l'obscurantisme. Ils ne voient pas à mal et pense juste sauver une âme perdue possédée par le Malin. Une pure réflexion inspirée sous forme d'un véritable suspens.
Techniquement, c'est aussi magnifique dans tous les domaines. Les images sont superbes. Le montage est parfait. 4 mois était fait d'une succession de longs plans fixes. Il y en a encore ici, de longs plans séquences beaucoup plus hystériques, et des scènes tournées caméra à l'épaule rendant bien l'urgence et la fébrilité des situations.
Un mot sur le casting qui est formidable. La mère supérieure et toutes les nonnes sont jouées merveilleusement par une troupe d'actrices épatantes. Le prêtre est lui aussi très bien, incarné par Valeriu Andriuta fidèle du réalisateur. Et puis bien sûr, il y a Cosmina Stratan et Cristina Flutur. Elles ont partagé le prix d'interprétation cannois qui est, chacune dans leur genre, largement mérité.
Contre toute attente, Au-delà des collines est un vrai film d'amour. Où l'amour est partout (alors que dans Amour, je n'en ai point vu...). Que ce soit l'amour de Dieu, de son prochain ou l'amour d'une personne. Un film fort, puissant, plus troublant que dérangeant. En tout cas, passionnant. Cristina Mungiu est un grand...Il nous offre une nouvelle fois un chef d'oeuvre, un film inoubliable qui aurait fait une très belle Palme d'or...