Broken

Le cinéma britannique n'en finit pas de nous étonner. Pour son premier long métrage, Rufus Norris réussi un film coup de poing et s'impose d'emblée comme l'un des dignes successeurs de ses glorieux ainés, de Stephen Frears à Ken Loach, entre autres. Après le choc Tyrannosaur, Broken nous décoche un nouvel uppercut dans l'estomac -même si celui-ci est un peu moins violent. Dès la scène d'ouverture, terrible, on comprend immédiatement que cela ne va pas être de tout repos. Paradoxalement, cela se calme très vite pour glisser vers une sorte de comédie plus tendre, grinçante et réaliste. Pas pour longtemps. La noirceur prendra bien vite le pas sur la légèreté. Une montée en puissance régulière nous met alors de plus en plus mal à l'aise. On tendrait vers la perfection si une fin plus convenue et un peu mielleuse ne venait légèrement gâcher l'ensemble. Ce n'est pas trop grave car le tout reste fort et dérangeant. La mise en scène est fluide, à la fois nerveuse et solide, bénéficiant d'un montage et d'une construction originale. Le scénario de Mark O'Rowe (auteur du superbe Boy A) est une merveille d'écriture. Mais ce qui retiendra peut être le plus notre attention est l’interprétation sans faille de l'ensemble du casting. Tim Roth et Cillian Murphy comme toujours très bien, Rory Kinnear et Robert Emms assez impressionnants mais la révélation incontestable est la jeune Eloise Laurence. C'est son premier film et elle est tout bonnement bluffante. Dans ce rôle de petite fille qui prend brutalement conscience des choses de la vie, elle irradie et porte véritablement le film sur ces frêles épaules.

Drame social, sur fond de perte de l'innocence, Broken est une très belle réussite. Un fond terrible pour une forme qui sort un peu de l'ordinaire, une fois n'est pas coutume. Aussi violent que délicat, on en ressort avec une boule au ventre. Marquant.